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Mercredi des cendres.

Mercredi des cendres 2012 à Carqueiranne
Catholique et Français
"Pénitence ! Pénitence ! Penitence !" (l'Ange de Fatima, Saint Michel)
La pauvreté (...et Notre Dame) sauvera le monde !
L’ESPRIT DE SAINT PIE X 🤗
« QUEL triomphe, écrit le cardinal archevêque de Venise, Joseph Sarto, le jour où à Venise reculera la pauvreté. LaCité d’Orest une reine en haillons sous un manteau de princesse. Sur le Grand Canal les palais succèdent aux palais, …Plus
"Pénitence ! Pénitence ! Penitence !" (l'Ange de Fatima, Saint Michel)
La pauvreté (...et Notre Dame) sauvera le monde !
L’ESPRIT DE SAINT PIE X 🤗
« QUEL triomphe, écrit le cardinal archevêque de Venise, Joseph Sarto, le jour où à Venise reculera la pauvreté. LaCité d’Orest une reine en haillons sous un manteau de princesse. Sur le Grand Canal les palais succèdent aux palais, cependant que derrière habite la misère. Je ne serai heureux que lorsque je serai le dernier mendiant de Venise. »
On rapporte qu’un jour le cardinal Sarto, futur Saint Pie X, pénétrant en une misérable chambre se trouve face à face avec une femme étendue sur un grabat.
« Madame, lui dit-il, j’ai appris que vous étiez malade ; je suis venu vous saluer et vous aider, si je le puis. J’ai, dans mes grandes poches, du pain, du vin qui, ma foi, n’est pas mauvais. Et l’on vient de me remettre quelques pièces de monnaie. Tout cela est peu, je m’en excuse, mais tous les deux nous sommes pauvres.
Je le vois, mon bon Monsieur. À quelle église êtes-vous donc employé ?
À la cathédrale.
Eh bien ! s’écrie la femme, regardant avec pitié la soutane du prêtre, vous devez avoir la dernière place à la cathédrale. C’est dommage que, charitable comme vous êtes, vous ne soyez pas le Patriarche : vous m’auriez apporté des pièces d’or.
Madame, le Patriarche n’a pas un centesimo de plus que moi.
Mon pauvre Monsieur, il nage dans l’or.
Le cardinal essaie d’apaiser ce cœur que la souffrance affole : il parle de la bonté de Dieu.
Laissez-moi rire, éclate la malheureuse ! Votre Bon Dieu, il est pour les riches, il oublie les pauvres. Du haut de son Ciel il ne regarde même pas notre rue : elle sent trop mauvais pour lui. Mais je ne devrais pas vous dire cela, parce que vous ne reviendrez plus me voir.
Si, Madame, je reviendrai. »
Le Patriarche quitte la pièce, chancelant comme un homme ivre.
Cette nuit-là, il ne peut trouver le sommeil. Il se lève, allume une bougie et, sans bruit, parcourt la demeure cherchant ce qu’il pourrait encore mettre en gage pour sauver les pauvres gens.
Tant de choses ont été vendues : les deux candélabres d’argent massif offerts par le chapitre de Saint-Marc, les cadeaux reçus le jour de son intronisation. Et la caisse est vide.
« Dieu oublie les pauvres ! » Les mots atroces frappent les tempes de Mgr Sarto comme autant de coups de marteau.
Bientôt l’aube se lève. Venise sort de l’ombre. On dirait sur les eaux une mouvante nuée, rosé et or. Puis, dans la brume lumineuse, la Cité s’affirme. Brusquement, dans le soleil ressuscité, Venise apparaît immobile et superbe : toutes les couleurs du prisme sont sur elle.
Pendant ce temps, au Patriarcat, Mgr Sarto, qui ne s’est pas couché de la nuit, considère, comme frappé de stupeur, le précieux crucifix du pape saint Pie V, don des cardinaux romains.
« Non ! dit-il, je ne puis le mettre en gage. Pas encore. La prochaine fois, peut-être. Et le Patriarche décide : Une fois de plus j’irai rendre visite au vieux Lévi. À Salzano, il m’avait avancé une jolie somme d’argent sur mon anneau d’archiprêtre. Que ne fera-t-il pas pour cet anneau de Patriarche, donné par de si généreuses personnes. »
Le cardinal se dirige en catimini vers la maison du prêteur.
Après une série de respectueuses salutations, le vieux Lévi, qui déjà a deviné ce dont il s’agit, interroge humblement :
« Qu’est-ce qui me vaut l’honneur de la présence dans ma modeste boutique, de son Illustrissime Éminence ?
Ceci, répond le cardinal, en posant sur la table son anneau patriarcal.
Dieu de nos pères ! Son Éminence voudrait-elle engager son anneau ? Mais elle doit en avoir besoin pour les offices à la cathédrale.
Mon bon Lévi, le Christ s’inquiète plus de mon cœur que de mon anneau lorsqu’il descend sur l’autel. Et, pour bénir en Son Nom mes chers Vénitiens, ma main toute nue continuera de le faire aussi bien.
C’est toujours le généreux pasteur que je retrouve, c’est le curé de Salzano qui est devant moi.
Oui, mais plus misérable, mon ami. À Salzano, il m’arrivait de ne rien avoir en poche, c’est vrai. Mais à Venise je suis le roi des gueux. Allons, combien me donnez-vous ?
Voyons, qu’est-ce que peut donner le vieux Lévi ? quatre cents lires ?
Non, huit cents.
Miséricorde ! Avec vous, Monseigneur, c’est toujours le double. Mais, Éminence, songez à ce que c’est que huit cents lires !
Oui, mon bon Lévi, le double de quatre cents lires.
Monseigneur, vous énoncez ce chiffre, comme ça, sans émotion !
« Ah ! je le dis souvent à mon fils, le petit Salomon, autrefois, j’ai connu notre bon Patriarche ; comme il traitait bien une affaire ! Il t’apprendrait, mieux que moi, comment on sait ne rien céder... ou l’indispensable.
« Mais, Éminence, broutille que tout cela quand je songe auxCaisses ouvrièresque vous avez fondées : vingt-sept Caisses ! Et à laBanque de Saint-Marc ”, cette machine miraculeuse où les travailleurs empruntent l’argent sans intérêt, et reçoivent de gros revenus en y déposant leur épargne. Il est vrai que tout cela gêne bien un peu les prêteurs à gages.
Ça, je le regrette sincèrement, affirme le Patriarche avec un sérieux comique. Et le vieux Lévi poursuit :
À Salzano, j’y pense encore, vous étiez parvenu à relancer la Manufacture de l’ami Jacur. Et cela, en lui faisant augmenter les salaires des ouvriers et construire pour eux de jolies habitations.
Tout le monde en était content, interrompt joyeusement Mgr Sarto.
À Venise, vous venez de réussir la même opération avec les industries des dentelles, et notre Manufacture de tabac. Éminence, vous êtes aussi fort que notre père Jacob. Vous vous souvenez comment il parvint à faire mettre bas des agnelets bien rayés et tachetés, parce qu’un jour il avait été convenu entre Laban et lui que lui reviendraient les seuls agneaux bigarrés du troupeau.
Et Jacob fut béni, lance en riant le Patriarche.
Oui, constate Lévi, il eut la bénédiction et aussi le profit. »
Mais l’Israélite devenu subitement grave :
C’est entendu, Monseigneur, donnez-moi votre anneau, et voici huit cents lires. Je trouve beau que vous, éminentissime cardinal et patriarche, vous restiez à Venise, comme à Salzano, le fidèle client du vieux Lévi.
– Vraiment, vous trouvez cela beau, mon bon ami. Et, chassant un nuage de tristesse, Mgr Sarto ajoute :
Pourtant, si jamais on l’apprend, on me critiquera encore dans Venise. »
Le lendemain matin, Giovanni Bressan jette par hasard un coup d’œil sur la main du Patriarche :
« Monseigneur, dit-il, n’auriez-vous pas perdu votre anneau ?
Mgr Sarto paraît ne pas comprendre.
Monseigneur, insiste le secrétaire, ne l’auriez-vous pas encore...
Eh bien, oui, déclare le cardinal, c’est Lévi qui l’a. Mais n’en parle à personne, surtout pas à mes sœurs. Voici le reçu, garde-le bien, car il faudra que je dégage mon anneau le plus vite possible.
Ah ! Monseigneur, que Dieu vous préserve de devenir Pape, soupire don Bressan,vous seriez capable de mettre en gage la basilique de Saint-Pierre. »
Quelques heures après, Giovanni Bressan entre en coup de vent dans le bureau de Mgr Sarto.
Qu’y a-t-il ? interroge anxieux le Patriarche.
Monseigneur, lance le secrétaire au comble de l’émotion, voici votre anneau... et vous devez conserver les huit cents lires... on m’a fait promettre le secret. Mais... le vieux Lévi sort d’ici. »
Les deux prêtres se regardent silencieux.
(Michel Fontbel, Fioretti de saint Pie X, p. 108-112)