L'histoire, une passion française

Cet été, les Français révisent leur histoire. Les livres, les émissions de radio ou de télé dédiés connaissent un succès sans précédent.

 L'histoire, une passion française

    Dire qu'au collège et au lycée, beaucoup d'élèves trouvent la matière barbante! Pour leurs parents, c'est une tout autre histoire. Les dates, les grands hommes, les bataillesâ?¦ Ils en redemandent! Surtout pendant les vacances, quand ils ont un peu plus de temps pour se plonger dans le passé. Quiz, romans, suppléments de magazines, émissions, séries TVâ?¦ L'offre n'a jamais été aussi foisonnante et le public aussi gourmand. Ce soir, les téléspectateurs devraient encore être très nombreux à suivre l'ascension et la chute de Nicolas Fouquet dans « Secrets d'histoire » (sur France 2, à 20h35). Stéphane Bern, son animateur, jubile : « Nous avons réuni 4 millions de personnes pour François Ier et 3,5 millions pour Toutankhamon. Pas mal pour une vieille momie, surtout qu'il y avait Dr House en face! L'été, les gens veulent apprendre en se distrayant. »

    Certains nous diront que cet engouement ne date pas d'hier. « Souvenez-vous d'Alain Decaux raconte. Ce qui est nouveau, c'est que les directeurs de journaux, les patrons de l'audiovisuel ou les éditeurs ont pris conscience que c'était un créneau très porteur », analyse l'historien Franck Ferrand, qui anime « Au cÅ?ur de l'histoire », sur Europe 1. Mais pourquoi, à l'heure d'Internet, se passionner pour de lointains récits de reines trompées, de peste noire ou de conquêtes militaires? « Les gens ont besoin de rêver, de s'évader du quotidien en écoutant de belles histoires, divertissantes et rassurantes », poursuit Franck Ferrand.

    C'est aussi ce que pense Lorànt Deutsch, dont le « Métronome » qui raconte les riches heures de Paris est devenu en deux ans un phénomène d'édition : 1,3 million d'exemplaires écoulés, mieux que les 800000 ventes de « l'Histoire pour les Nuls ». « Quand on ne sait plus trop où l'on va, comme aujourd'hui, on explore ses racines. L'histoire de France, je la vois comme un livre de famille, avec plein d'aïeux incroyables, de Charlemagne à Olympe de Gouges. Un tel pedigree, c'est bon pour notre moral », sourit l'acteur écrivain, qui prépare un livre sur les routes de France. S'offrir un détour sous Louis XV, quand le rayonnement de la France était sans égal, voilà donc qui regonfle notre ego national, malmené par le déclinisme ambiant.

    « Le sentiment de déclassement nourrit notre goût pour l'histoire », assure Jean Lebrun, professeur agrégé et animateur de « la Marche de l'histoire », l'émission la plus podcastée de France Inter. « L'époque est à la nostalgie », renchérit Franck Ferrand, qui présentera une nouvelle émission d'histoire sur France 3 dès le 28 septembre.

    Stéphane Bern confirme, mais pointe derrière notre appétit pour le passé un problème très présent : « L'école ne remplit pas sa mission. On n'y apprend plus rien. Peut-être est-ce lié à la façon de l'enseigner? Une chose est sûre, les programmes sont terriblement malmenés. Les gens me disent qu'avec Secrets d'histoire, ils renouent avec le plaisir d'apprendre », fustige le présentateur. Fans de petites histoires qui ont tissé les siècles, les Français n'en négligent pas pour autant la grande. Ils lisent des biographies ou des essais et se déplacent aussi pour de vrai. Comme au Mémorial de Caen, qui n'a pas désempli de l'été.