La leçon d’histoire de Poutine à Tucker Carlson au crible de la politique et de la vérité

Poutine Tucker Carlson histoire
 

Bien des milieux chrétiens conservateurs et nationalistes ont bu comme du petit lait l’entretien accordé par Vladimir Poutine à l’ex-journaliste vedette de Fox News le 6 février dernier. Nous y avons consacré un premier article principalement constitué par la traduction du commentaire d’Alex Newman, grand connaisseur des orientations réelles du mondialisme, où celui-ci montre comment l’invasion russe de l’Ukraine sert en définitive la « régionalisation » du monde et son « intégration » ultérieure. Mais tel est le poids accordé aux paroles du président russe, présenté comme défenseur des valeurs traditionnelles et du christianisme face à la dégénérescence de l’Occident, qu’il convient d’y revenir.

Mais non sans un court détour par les « shorts », les mini-documentaires publiés par Tucker Carlson revenu ébloui de Moscou… Il a fait filmer sa visite de la station de métro Kiyevskaïa « construite par Joseph Staline il y a 70 ans ». Oui, pendant que le petit père des peuples faisait ses purges et perpétuait la sanglante tyrannie léniniste et le Goulag, et que la misère communiste pesait sur des millions de gens ordinaires sous la surveillance de Big Brother, la capitale russe se voyait doter d’un métro ultra-luxueux. Ce n’est pas tout à fait le village Potemkine du XXe siècle, puisqu’il s’agit d’un vrai métro, de vraies stations et que la population s’en sert depuis des décennies. Mais quand même…

Les gros plans sur les mosaïques ornant les couloirs et les quais, parfaits exemples de l’art soviétique montrant une population radieuse célébrant l’amitié russo-ukrainienne, méritait un petit commentaire, plutôt qu’une musique de film romantique de l’après-guerre… Mais pas un mot sur une mosaïque de Lénine, qui trône toujours au fond du hall principal : Staline, multi-représenté dans la station, a été gommé partout sous Krouchtchev, et on avait démantelé la mosaïque où il figurait avec Lénine désormais seul honoré.

La Russie qui prétend « dénazifier » l’Ukraine n’a pas de scrupules à conserver le cadavre et les portraits de ce monstre qu’elle ne renie pas.

 

Les silences de Tucker Carlson et de Vladimir Poutine

De tout cela, Tucker Carlson n’a rien vu ou, en tout cas, n’a pas jugé utile de parler. Voilà qui fait écho à son silence sur de nombreux thèmes qui, vue la posture de Poutine en maître d’histoire au cours de leur entretien, auraient mérité quelques questions pertinentes. Après avoir annoncé qu’il n’allait « prendre que 30 secondes ou une minute pour faire une courte référence à l’histoire afin de donner un peu de contexte historique », Poutine s’est lancé dans un long cours d’histoire de 45 minutes, évidemment destiné à l’autojustification de l’invasion de l’Ukraine et donc entièrement conçu à cette fin, où il n’a pas évoqué en tant que tels les 70 ans de communisme qui ont, au moyen de la dialectique matérialiste chère à Lénine, ruiné la Russie, détruit sa culture, persécuté la foi, envoyé des dizaines de millions de personnes à la mort pour instaurer un « paradis des travailleurs » dont on n’a jamais vu l’ombre d’un commencement. Tout au plus a-t-il utilisé une fois le mot, et dans un contexte de vocabulaire marxiste : « Nous sommes aujourd’hui tout aussi bourgeois que vous. Nous sommes une économie de marché et il n’y a pas de pouvoir du parti communiste. »

C’est une lacune majeure. Poutine aurait même pu profiter de l’occasion pour dénoncer l’« Occident » ou l’Allemagne qui ont facilité et financé la révolution bolchevique et plongé la Russie dans un enfer qui a duré bien plus longtemps que l’horreur nazie. Le président de la Fédération de Russie, qui a plusieurs fois qualifié la chute de l’Union soviétique de désastre, affirmant en 2005 : « La chute de l’URSS a été la plus grande catastrophe géo-politique du siècle », n’a critiqué Lénine et Staline que pour leur rôle dans la création de l’Ukraine présentée comme une fabrication artificielle, et pour leur autorisation de principe quant au retrait de l’Union des nouvelles « entités autonomes » qui en faisaient partie. Et il a noté en passant que « le régime de Staline », « comme beaucoup l’affirment, a vu de nombreuses violations des droits humains et des violations des droits des autres Etats ».

Tucker Carlson aurait pu opportunément rappeler que Poutine ne manque pas aujourd’hui de glorifier la mémoire de Staline – les exemples concrets abondent – mais il s’est abstenu, alors même qu’il reprenait enfin la parole à ce moment-là. Il n’a pas non plus demandé pourquoi Poutine n’a évoqué que ces « violations » ponctuelles, alors que la période soviétique, qu’il a assumée à l’histoire ukrainienne près, a été l’un des pires totalitarismes que le monde a connus et que la Russie reste l’alliée et l’amie de totalitarismes similaires, à commencer par la Chine et la Corée du Nord communistes.

 

La leçon d’histoire de Poutine travestit le pacte Molotov-Ribbentrop

Poutine a pu au contraire développer son argumentaire sans être sérieusement contesté, pas même au sujet du pacte Molotov-Ribbentrop qui solennisa l’entente des nazis et des soviétiques à l’orée de la Seconde Guerre mondiale, assurant à Hitler la tranquillité de pouvoir envahir la Pologne sans craindre d’être attaqué par l’URSS – avant le retournement de situation en 1941.

A ce sujet, le grand historien du communisme qu’est Stéphane Courtois co-signait en 2005 avec le biographe de Boris Souvarine, Jean-Louis Panné – juste après un autre de ces « cours d’histoire » qu’affectionne Poutine – un article qui mettait les points sur les i, dénonçant la réécriture de l’histoire par ce dernier « selon les méthodes éprouvées du totalitarisme stalinien ». Tout est à lire mais on peut déjà retenir ceci :

« Le “professeur” Poutine déclare qu’en 1989, le Soviet suprême de l’URSS a donné une appréciation juridique et morale précise du pacte Molotov-Ribbentrop. Faut-il en conclure qu’il ne parvient toujours pas à penser l’histoire en dehors de la version soviétique officielle ? D’autant que notre “professeur” ne dit pas un mot sur le second pacte germano-soviétique, du 28 septembre 1939, fixant les frontières et assurant une collaboration de la Gestapo et du NKVD. Poutine se plaint de l’attitude des Etats baltes, mais n’a pas un mot sur le sort des pays occupés par l’URSS. L’URSS a-t-elle traité autrement que les nazis les pays qu’elle a annexés entre 1939 et 1941 et occupés à nouveau en 1944-1945 ? Certes, l’Armée rouge a libéré les pays d’Europe de l’Est du nazisme, mais il ne faut pas confondre libération et liberté. Ces pays ont été soumis à une autre oppression. Poutine nie également les massacres soviétiques de Katyn en Pologne, rendant hommage aux victimes de Kathyn, village biélorusse à l’orthographe proche où furent commis des massacres par les nazis. Le président Poutine a également honoré l’alliance conclue par De Gaulle et Staline à Moscou en décembre 1944, mais il oublie le mépris que le second avait pour la France.

« Ce négationnisme historique montre que Poutine est resté fidèle à l’enseignement qui pouvait être dispensé sous l’ère brejnévienne à un officier du KGB. »

En 2005, l’objectif était autre : Poutine faisait des ouvertures à la France et à l’Allemagne pour aller vers « une grande Europe unie de l’Atlantique à l’Oural ». L’expression et le mode d’action ont changé, la réécriture de l’histoire se poursuit.

C’est ce qu’a également noté Sergey Radchenko dans The Spectactor :

« Carlson n’a pas interrompu Poutine lorsque celui-ci a reproché à la Pologne d’avoir précipité la Seconde Guerre mondiale en ne cédant pas pacifiquement son territoire à Adolf Hitler. Les Polonais, a déclaré Poutine, ont “contraint” Hitler à les attaquer parce qu’ils n’ont pas négocié. Hitler “n’avait donc plus rien d’autre à faire que de commencer à mettre en œuvre son plan vis-à-vis de la Pologne”.

« Carlson aurait dû faire remarquer à Poutine que cet embarras d’Hitler pouvait très bien s’appliquer à Poutine lui-même, car lui aussi avait dit à plusieurs reprises qu’il n’avait pas d’autre choix que d’envahir l’Ukraine, étant donné qu’elle n’avait pas voulu céder pacifiquement son territoire pour calmer ses ambitions impérialistes. Carlson, cependant, a laissé le surprenant révisionnisme historique de Poutine incontesté et a même opiné du chef à la fin de la diatribe, en ajoutant : “C’est vrai.”

« C’est faux. Le fait que Poutine ait passé autant de temps dans cette interview à fouiller dans le passé ancien et moins ancien montre à quel point il est obsédé par l’histoire. Il ne s’agit pas d’histoire pour l’histoire, bien sûr. Poutine est obsédé par l’histoire parce qu’il a pris à cœur le slogan du Parti tiré de 1984 de George Orwell : “Qui contrôle le passé contrôle l’avenir.” C’est l’avenir que veut Poutine : un avenir où l’Ukraine, si elle existe, n’est qu’un appendice du grand Etat russe. »

Radchenko a ajouté des faits que lui ont appris les travaux d’autres historiens comme les siens, notamment au sujet de la « promesse » qui aurait été faite en février 1990 à Gorbatchev par James Baker de ne pas étendre l’OTAN vers l’Est. Il affirme : « Nous disposons désormais d’une compréhension très nuancée de ce qui s’est exactement passé en février 1990, et de ce que la promesse de Baker ne ressemblait pas du tout à une promesse. Nous savons également que Gorbatchev n’a jamais accepté le “deal” de Baker. Au lieu de cela, il a accepté un accord qui permettait l’élargissement de l’OTAN vers l’Est. » Carlson aurait dû le savoir, souligne Radchenko – et le dire. Peut-être, ajoute l’historien, le but de l’entretien était-il de promouvoir une paix négociée. Et c’est vrai que Poutine y a semblé sensible, puisqu’il a profité de l’interview pour lancer aux Etats-Unis : « Si vous voulez vraiment arrêter les combats, vous devez cesser de fournir des armes. Tout sera terminé en quelques semaines. » A son avantage, cela va de soi.

 

Devant Tucker Carlson, Poutine accuse cette OTAN qu’il aurait tenté de rejoindre

Mais ce sera de toute façon la faute de l’« OTAN » : Vladimir Poutine n’a-t-il pas laissé entendre qu’il avait fait des ouvertures en vue de rejoindre cet OTAN et cet Occident qu’aujourd’hui il conspue ? Il affirme avoir jadis posé la question en direct à Bill Clinton, qui semblait trouver l’idée « intéressante », mais qui est revenu après des pourparlers avec son « équipe » en disant « non ». « S’il avait dit “oui”, le processus de rapprochement aurait commencé, et cela aurait pu se faire. » Le croira qui voudra. Ce n’est d’ailleurs pas le seul exemple d’un « rapprochement » demandé par la Russie, puis rejeté par les Etats-Unis – en l’occurrence, George Bush senior – autour du Missile Defense System. Une fois de plus, qui veut peut le croire ; mais ce qui est sûr, c’est que face à un Occident affaibli, perdant de plus en plus ses repères moraux, la Russie a choisi de passer à l’attaque. Mais en prenant soin de faire penser à une part non négligeable des populations occidentales, les plus conservatrices, que c’est vers lui qu’il faut se tourner. C’est d’ailleurs vers ces populations qu’était dirigé l’entretien dans la tête de Poutine, sa vraie « cible » selon une analyse de John Horvat.

Poutine, l’ancien invité de Klaus Schwab à Davos se serait-il retourné contre les copains d’alors ? Est-il « devenu incontrôlable », comme le dit Horvat, et à ce titre ennemi du mondialisme promoteur de toutes les idéologies les plus folles ? « La verité est tout autre », répond l’analyste.

Si les conservateurs occidentaux sont séduits, c’est notamment en raison du discours religieux de Poutine. Mais c’est un Russe orthodoxe, exclusivement. Il n’a jamais évoqué la persécution des catholiques dans son « cours d’histoire » : au contraire, dans sa présentation de l’Ukraine, il a laissé entendre que seuls les orthodoxes la représentent vraiment. Ce furent au demeurant les derniers mots de son entretien :

« Tout le monde en Occident pense que le peuple russe a été divisé par les hostilités pour toujours. Non, il sera réuni. L’unité est toujours là. Pourquoi les autorités ukrainiennes démantèlent-elles l’Eglise orthodoxe ukrainienne ? Parce qu’elle réunit non seulement le territoire, mais aussi nos âmes, que personne ne pourra séparer. »

Et pas un mot sur la « réunification forcée » des Ukrainiens Grecs catholiques avec l’Eglise russe orthodoxe par le synode de Lviv ordonné en 1946 par Staline. Les catholiques ont dû passer dans la clandestinité, leurs biens ayant été confisqués au profit des orthodoxes, avant de retrouver la liberté et le droit de pratiquer après la chute de l’Union soviétique. « Les catholiques ukrainiens ne savent que trop que si Poutine atteint son but d’absorber de nouveau l’Ukraine dans la Russie, il fera tout ce qui sera en son pouvoir pour oblitérer la foi catholique en Ukraine », écrit Horvat.

Quoi, Poutine, ce bon chrétien ?

Eh oui… On ne souligne pas assez que le christianisme de Poutine est d’une variété particulière, lui qui fait la promotion du dialogue inter-religieux en Russie (ou au Kazakhstan, sous l’égide d’un ancien dignitaire de la République soviétique), lui qui accuse l’Occident d’« islamophobie » hostile au monde « multipolaire ».

 

Le christianisme relativiste de Poutine

Les déclarations de Poutine à Tucker Carlson au sujet du christianisme méritent d’être citées in extenso :

« Comme je l’ai déjà mentionné, en 988, le prince Vladimir lui-même a été baptisé selon l’exemple de sa grand-mère, la princesse Olga. Il a ensuite baptisé son escouade, puis, progressivement, pendant plusieurs années, il a baptisé toute la Rus. Ce fut un long processus, ce passage de païens à chrétiens a pris de nombreuses années.

« Mais à la fin, cette orthodoxie, le christianisme oriental, s’est profondément enracinée dans la conscience du peuple russe. Lorsque la Russie s’est étendue et a absorbé d’autres nations qui professaient l’islam, le bouddhisme et le judaïsme, elle a toujours été très loyale envers les personnes qui professaient d’autres religions. C’est sa force.

« C’est absolument clair. Et le fait est que les principaux postulats, les principales valeurs sont très similaires, pour ne pas dire identiques, dans toutes les religions du monde que je viens de mentionner et qui sont les religions traditionnelles de la Fédération de Russie, de la Russie.

« D’ailleurs, les autorités russes ont toujours été très attentives à la culture et à la religion des personnes qui entraient dans l’Empire russe.

« A mon avis, cela constitue la base de la sécurité et de la stabilité de l’Etat russe. Tous les peuples qui habitent la Russie la considèrent comme leur mère. Si, par exemple, des gens viennent d’Amérique latine pour s’installer chez vous ou en Europe, un exemple encore plus clair et plus compréhensible, des gens viennent, mais ils sont venus chez vous ou dans les pays européens depuis leur patrie historique, et les gens qui professent différentes religions en Russie considèrent la Russie comme leur patrie, ils n’ont pas d’autre patrie.

« Nous sommes ensemble, c’est une grande famille. Et nos valeurs traditionnelles sont très similaires. Je viens de parler d’une grande famille, mais chacun a sa propre famille. C’est la base de notre société. Et si nous disons que la patrie et la famille sont spécifiquement liées l’une à l’autre. »

Au-delà des mots sur la famille et la patrie, des mots qui sont aptes à retenir l’attention des « conservateurs » désolés devant la déliquescence morale en Occident, il faut bien comprendre que pour Poutine, la religion est une valeur indifférente et interchangeable : islam, bouddhisme, judaïsme, orthodoxie, c’est quasiment la même chose. En creux, on lit la critique de ce qui a fait la grandeur de l’Occident catholique : cet Occident qui a évangélisé les peuples au lieu d’être, comme le dit Poutine, « très loyale envers les personnes qui professaient d’autres religions ». Il leur a porté le Christ ; la Russie les a englobés tels quels dans la « mère patrie russe ».

Lorsque Tucker Carlson lui a demandé : « Voyez-vous le surnaturel à l’œuvre lorsque vous regardez ce qui se passe dans le monde aujourd’hui ? Voyez-vous Dieu à l’œuvre ? Vous arrive-t-il de vous dire que ce sont des forces qui ne sont pas humaines ? », Poutine a répondu :

« Pour être honnête, je ne le pense pas. Mon opinion est que le développement de la communauté mondiale est conforme aux lois inhérentes, et que ces lois sont ce qu’elles sont. Il en a toujours été ainsi dans l’histoire de l’humanité. Certaines nations et certains pays se sont développés, sont devenus plus forts et plus nombreux. Puis ils ont quitté la scène internationale, perdant le statut auquel ils étaient habitués. »

Voilà une réponse parfaitement compatible avec le matérialisme marxiste, une réponse qui renvoie vers le « sens de l’histoire » et qui rejette Dieu comme maître de l’histoire. Si Poutine – à la suite d’idéologues comme Alexandre Douguine – pense avoir Dieu de son côté, et il a en tout état de cause l’Eglise orthodoxe russe de son côté – il n’en attend clairement pas la victoire, seulement une étiquette utile dans les circonstances actuelles, si l’on veut bien tirer les conséquences de son relativisme. Comme Staline lâchant du lest religieux au moment de la Seconde Guerre mondiale.

 

Poutine, un professeur d’histoire woke

Au fond, comme l’analyse Michael Cook pour MercatorNet, Poutine se comporte en professeur d’histoire woke. Il fait de la « cancel culture », se focalisant sur un grief réel ou supposé mais sans donner le contexte qui le nuance (comme on dénonce le colonialisme sans évoquer les bienfaits qu’il a pu apporter sur certains plans), en avançant une avalanche d’arguments, vrais ou faux, qui justifient ses actions, mais sans chercher la vérité ni même réfléchir aux conséquences de ses modes de raisonnement. Il note :

« Cependant, il est dangereux d’utiliser l’histoire comme une arme. Elle devient une bombe qui peut vous exploser à la figure. La Russie actuelle est le fruit de l’expansion impériale des tsars. Certaines terres gouvernées par le président Poutine n’ont été réunies dans l’étreinte de la mère Russie qu’au XIXe siècle. Dans la région du Caucase, la Géorgie, la Tchétchénie et le Daghestan étaient gouvernés par la Perse jusqu’à ce que la Russie s’en empare au cours d’une série de guerres aux XVIIIe et XIXe siècles. Que se passerait-il si l’Iran décidait de profiter de la faiblesse de la Russie à un moment donné et récupérait ses anciennes possessions ? En fait, tous les voisins de la Russie pourraient monter un dossier académiquement respectable pour aller croquer une bouchée dans ses marches. »

L’histoire sert ici d’habillage à la force. Et peut-être même de déguisement pour des entreprises dont le but est plus global, et passe par la « multipolarité », la montée du yuan, la montée de la Chine de son « collègue et ami Xi Jinping » que Poutine refuse de voir comme « agressive », la montée du poids des BRICS dans l’économie mondiale. Il a annoncé plutôt, en réponse à une question sur Musk et son implant de puce dans un cerveau humain, de nouvelles formes d’entente internationale, en des termes qui en disent long sur un certain équilibre des forces, ou de la terreur, comme vous voudrez :

« Lorsque l’humanité a senti que les armes nucléaires représentaient une menace existentielle, toutes les nations nucléaires ont commencé à se réconcilier les unes avec les autres. Elles ont compris que l’utilisation négligente de l’armement nucléaire pouvait conduire l’humanité à l’extinction. Il est impossible d’arrêter la recherche en génétique ou en intelligence artificielle aujourd’hui, tout comme il était impossible d’arrêter l’utilisation de la poudre à canon à l’époque. Mais dès que nous aurons compris que la menace vient d’un développement débridé et incontrôlé de l’IA ou de la génétique, ou de tout autre domaine, il sera temps de parvenir à un accord international sur la manière de réglementer ces choses. »

En attendant, la Russie continue tranquillement son excursion en Ukraine. Au nom de la paix, qui sait quelle « entente » mondiale en résultera ?

 

Jeanne Smits